Perception de Cairanne, vendredi 13 octobre 1797, 18 h 45.

– Monsieur Dumas ?
– Oui, Hyacinthe ?
– J’entends du bruit à la porte, alors que je l’ai la verrouillée tout à l’heure.
– Allez donc vérifier, si vous avez un doute.
L’employée de la perception s’exécuta. En s’approchant de la porte, elle vit que la poignée à double serrure inversée montrait des signes de résistance. Hyacinthe eut un mauvais pressentiment. Au même moment, le gond supérieur de la porte céda sous ce qui semblait être un coup de hache. Elle eut juste le temps de se reculer, avant que l’autre gond n’explosât. La force de l’outil tranchant fendit la porte en deux. Un visage d’homme, partiellement couvert d’un masque de tissu mal fait, apparut dans l’ouverture béante, révélant deux petits yeux noirs et déterminés. L’homme se mit à hurler :
– Si tu bouges, je te coupe en deux, comme la porte !
Submergée d’effroi, Hyacinthe s’effondra sur les genoux et perdit connaissance sur-le-champ. Hippolyte Dumas, impassible, restait assis à son bureau de directeur de la perception, observant la scène avec un détachement curieux. Le jeune homme n’avait que vingt-sept ans, mais présentait déjà la maturité et le cran d’un homme bien plus âgé, ayant acquis une forte expérience. Il fut le maire de Cairanne et depuis quelques mois, il officiait en tant que percepteur des impôts. Avec son mètre quatre-vingt-dix et ses cent kilos, son diplôme d’avocat obtenu à Avignon à vingt-deux ans, Hippolyte en imposait physiquement. Son esprit était affûté telle une lame de rasoir.
– C’est pour un paiement d’impôt ? lança-t-il ironiquement…

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